Archive mensuelles: décembre 2017

Le premier but de la médiation, c’est la division !

 

Ce texte est un communiqué d’occupant.es et d’habitantes de la zad de NDDL. Il n’a pas pour but d’étudier le détail du rapport de la médiation sur NDDL ou la possible décision du gouvernement à sa suite. Il vise à critiquer le travail de division du mouvement effectué par les médiateur.ices à travers leur présentation de « la zad » et de ses habitant.es et occupant.es.

LE PREMIER BUT DE LA MÉDIATION, C’EST LA DIVISION !

Ce texte n’a pas pour but d’étudier le rapport de la médiation sur NDDL ou la possible décision du gouvernement à sa suite. Il vise à critiquer le travail de division du mouvement effectué par les médiateur.ices à travers leur présentation de « la zad » et de ses habitant.es et occupant.es.

Dans la répression des mouvements qui contestent son autorité, le premier travail de l’État est toujours de nommer, de catégoriser ses opposant.es, pour produire les distinctions qui serviront à mettre en œuvre son travail répressif (par ex. entre bon.nes et mauvais.es manifestant.es, syndiqué.es et casseur.euses, radic.ales et pacifistes, etc.).

Le rapport des médiateur.ices sur NDDL participe à cette stratégie dominante de division, classant ainsi les « occupants hétérogènes » de la zad :

  • « les « historiques » : exploitants agricoles présents de longue date et impactés par le projet (…).
  • les « néo ruraux » implantés le plus souvent sans titre à partir de 2005 (…). [Leurs] options philosophiques et leurs motivations couvrent le spectre très large des mouvements altermondialistes et écologistes (…).
  • un noyau dur d’une cinquantaine d’individus radicaux et violents, en lien avec d’autres militants implantés dans d’autres sites en France et dans le monde. » (cf. « Annexe comparative » du rapport de médiation, p.96)

La présence d’agriculteurs dits « historiques » est bien une réalité de cette lutte – qui fut d’abord une lutte pour la préservation des terres agricole, avant de s’ouvrir au milieu des années 2000 et de s’élargir en une lutte ’contre l’aéroport et son monde’.

Mais la distinction entre gentils « néo ruraux » aux « options philosophiques et motivations » acceptablement « altermondialistes et écologistes« , et méchants « individus radicaux et violents en lien avec d’autres militants en France et dans le monde«  [*], cette distinction n’est qu’une fiction qui n’a pas d’autre but que de nous diviser pour mieux préparer la répression violente et judiciaire d’une partie du mouvement.

Depuis le début de l’occupation des terres, le mouvement de lutte contre l’aéroport et son monde s’est enrichi de la diversité de ses pratiques et de la complémentarité des tactiques mises en œuvre pour s’opposer au projet : par la contestation juridique et l’agitation médiatique, par la production d’expertises citoyennes et d’analyses politiques radicales, par l’occupation et la mise en culture des terres et la tentative d’y inventer de nouveaux modes de production et de partage, tout autant que par le sabotage, le piratage, et l’opposition physique, pacifique ou non, face aux forces répressives et aux machines de chantier envoyées par l’État et Vinci.

C’est grâce à cette diversité que nous avons su résister et arracher ce morceau de bocage à la main-mise de l’aménagement capitaliste du territoire et à l’extension de la métropole. Surtout, il n’y a rien d’exclusif entre ces différentes formes de résistance. Celles et ceux qui un jour cultivent, cuisinent, soignent ou construisent, peuvent très bien se masquer le lendemain pour aller affronter la police ou saboter une machine, quand la situation – et l’État – ne leur laisse pas le choix.

Occupant.es, habitant.es ou camarades de la zad, peu importe le moment de notre arrivée, les formes de notre résistance ou que nous ayons des pratiques agricoles ou non, nous savons que cette diversité est notre richesse et notre force. Ces pratiques de lutte, nous les assumons collectivement, et nous ne laisserons pas l’État s’en servir pour nous diviser et criminaliser certain.es d’entre nous.

Des habitant.es et des occupant.es de la zad réunies le jeudi 21 décembre 2017

Notes

[*Phrase qui ne veut magnifiquement rien dire, tout en sous-entendant le pire :

Des « individus » dont on ne sait ni d’où ni quand iels sont arrivé.es, n’ayant contrairement aux autres ni « motivations » ni « options philosophiques », mais étant uniquement définis par leur radicalité et leur violence. Définis aussi par leurs liens « avec d’autres militants implantés dans d’autres sites en France et dans le monde », ce qui ne veut pas dire grand chose non plus – qui n’a pas des liens avec d’autres personnes en France ou dans le monde, personnes qui sont parfois militantes ? – mais laisse planer la menace de l’appartenance à d’obscurs réseaux internationaux.

L’emploi d’exactement le même lexique utilisé habituellement pour parler du « terrorisme international » n’est pas innocent, même si le terme de terroriste n’est pas employé directement…

« Pour que la ZAD demeure un grenier de luttes » (Jef Klak)

Suite à tous les articles et les déclaration politiques anticipant une expulsion de la ZAD de Notre dame des landes, un article de Jef Klak revient sur l’expérimentation sociale qu’est ce « territoire libéré ».

 

« Zone en état de siège permanent », « caches d’armes à feu » voire « risque de morts ». Depuis la remise au gouvernement du rapport sur le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes le 13 décembre dernier, la même rengaine d’une ZAD aux mains de « professionnels de la contestation » qui piétine l’ordre républicain revient sur le devant de la scène médiatique. À l’heure qu’il est, tout reste encore possible : abandon du projet par le gouvernement, expulsion des occupant·es, ultime report d’une décision presque impossible. Entretien long format avec des occupant·es de la ZAD sur les derniers mois du mouvement et les perspectives de lutte, aussi réjouissantes que périlleuses.

2016 a été une longue séquence de menaces et d’offensives de la part du gouvernement Hollande pour se donner la possibilité d’intervenir sur la ZAD – c’est-à-dire expulser les occupant·es et démarrer les travaux.

En décembre 2015, durant la COP 21, nous avons organisé un convoi de trois cents personnes en vélos et tracteurs avec des paysan·nes, des militant·es associatif·ves, des habitant·es de la ZAD, des gens de la Coordination des opposants au projet d’aéroport et des comités locaux de soutien. Malgré les interdictions de circuler et l’état d’urgence qui venait d’être promulgué, l’objectif était de se rendre à Paris pour dénoncer l’opération de marketing écologique du gouvernement, qui poursuit ses projets éminemment climaticides. Comment pouvait-il s’engager en faveur de l’environnement alors que les travaux pour le futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes étaient annoncés, promettant de détruire zones humides et terres agricoles ?

 

Suite à cette mobilisation, le 31 décembre, Vinci décide de mettre en procédure d’expulsion les habitant·es dits « historiques » de la ZAD. La multinationale touche alors un symbole fort, car on parle des paysan·nes qui sont resté·es sur la zone malgré ses propositions de reprendre leurs terres.

Depuis 2012 et l’échec de l’opération César 2, l’État n’arrive pas à expulser la ZAD, car il s’est formé un front commun et solidaire anti-aéroport qui va des occupant·es, qui ont des pratiques d’action directe voire illégales, jusqu’aux militant·es associatif·ves, qui mobilisent les recours juridiques pour tenter de contrer légalement le projet. La stratégie du pouvoir est alors de créer des brèches dans cette unité via un biais vicieux : l’argent. Comme le gouvernement sait que les « historiques » ne partiront pas d’elleux-mêmes, il demande à la justice d’ajouter des astreintes financières aux procédures d’expulsion. Tou·tes ces habitant·es expulsables qui ont là leurs vaches, leur maison, leurs emprunts, se sont ainsi retrouvé·es sommé·es de payer chaque jour des amendes phénoménales.
(suite…)